Un homme de foi : Frère Jean-Jacques Campagna

Le 28 janvier 1918 à Montréal naît Frère Jean-Jacques Campagna, le quatrième enfant d’une famille de huit comprenant sept garçons et une fille. À l`âge de 14 ans à La Prairie, il se préoccupe déjà de l’éducation des Jeunes et veut mener une vie religieuse pour leur assurer une formation chrétienne. Ce rêve prend forme à la suite d’une retraite qui le mène à devenir Frère de l’Instruction chrétienne. En 1936, il devient pendant quinze ans professeur à l’école Saint-François-Xavier à Montréal.

Au début des années ’50, il suit une formation religieuse en Angleterre et sur l’île de Jersey pendant un an. De retour d’Angleterre, il est nommé directeur de l’école de Thurso, puis de Gatineau. Vers 1970, Frère Campagna sort de la congrégation et mène une vie laïque en demeurant directeur d’une école de la Vallée de la Lièvre. En 1981, il se retire et est de nouveau accepté comme religieux des Frères de l’Instruction chrétienne après un noviciat à Rome au cours duquel il rencontre le Pape Jean-Paul II. De retour au Canada, il occupera divers postes de direction d’école de 1982 à 2004. En 2005, cet homme de foi, qui a déjà rencontré Saint Frère André, prend une retraite définitive du milieu de l’éducation et se consacre aux activités de sa congrégation.

Frère Campagna et le pape

Dans ses temps libres, il apprend l’espagnol et l’électronique (radio et télévision) avant de s’amuser avec la méthode Destinos de la Télé-Université, puis d’entretenir un jumelage téléphonique. Cette langue lui permet sans doute de mieux comprendre la mosaïque humaine. Récemment, mes filles et moi avons élaboré un protocole d’entrevue et confié à ma femme la belle mission de tenir auprès de lui une conversation en espagnol pour y recueillir son testament spirituel. À l’approche de Noël, il me fait plaisir de vous brosser avec simplicité le portrait de cet homme de foi et ami de longue date.

Collège Jean-de-La-Mennais et Frère Campagna / Édifice des Frères de l'Instruction chrétienne

 

Frère Campagna considère l’entraide comme une valeur essentielle pour se sauver et bénéficier de la promesse de la vie éternelle. De façon très simple, j’aime aider les gens; mais pour cela, j’ai besoin de bien comprendre les situations et j’ai besoin des conseils d’amis qui m’aident dans la résolution de problèmes. J’aime être en compagnie de gens qui savent écouter. Bien qu’il se décrive comme une personne de confiance cherchant à mieux aider les autres, il regrette de ne pas pouvoir agir autant qu’il le souhaiterait en ce sens.

À titre de référence, il mentionne la vie spirituelle de ses héros, des Saints, comme Jean de Bosco, un éducateur italien, qui avait particulièrement à cœur l’éducation des Jeunes, en plus des services dans les infirmeries et les hôpitaux : un homme d’action et un modèle à suivre. De son côté, Frère Campagna démontre beaucoup d’amour à l’endroit des Jeunes et considère, entre autres, le sport comme l’une des meilleures manières d’établir un rapport de nature intergénérationnelle.



Oka

Le sens de l’entraide inspiré de Jean de Bosco monopolise une grande partie de l’entrevue. Je suis très âgé et je ne serai plus sur Terre bientôt. Il faut penser à tous ceux qui resteront et leur être utile. Il ne le dira pas, mais avec beaucoup de discrétion, il a pris à cœur de sortir des gens de situations extrêmement difficiles aussi bien en Colombie qu’au Canada, en plus de contribuer de façon importante à leur inculquer des compétences professionnelles et, dans certains cas, à les aider à reconstruire leur dignité humaine.

L’agir est de plus grande importance que la parole. Tout le monde va mourir un jour ou l’autre, alors notre passage sur Terre doit être le plus utile possible aux autres et orienté dans le sens du Bien. C’est ainsi que l’on peut mourir très heureux et croire en la résurrection promise par le Christ.

Déjà très âgé, Frère Campagna souhaite que chacun puisse se laisser guider par la foi en Dieu ou en ce que les gens croient être Dieu, et par l’espérance de la vie éternelle, aussi bien les itinérants que les victimes d’accidents de la route, etc. Ce principe valant pour tous, il rappellera que le fait de mener une vie religieuse aide la nature humaine. Sans l’aide constante de Dieu par la prière, un religieux est une personne comme une autre… Être humain, c’est essayer de faire de son mieux, mais les erreurs sont possibles.

Frère Campagna à Oka

 

Le sens de l’éducation constitue une autre valeur essentielle de Frère Campagna, qui n’apprécie pas du tout les critiques souvent formulées à l’endroit des éducateurs et des services scolaires. Cette vocation éducative l’aura particulièrement servi auprès des Indiens d’Oka, qu’il a beaucoup aimés, durant les années ’80 et dans ses discussions avec les directeurs d’écoles jusqu’à ce que l’édifice des frères soit rapatrié par le gouvernement fédéral en vue d’offrir davantage de services à la population locale. C’est à la suite de ce changement qu’il s’est retrouvé à la maison de la rue Brébeuf à Montréal avant de déménager au Collège Jean-de-la-Mennais à La Prairie.

À quelques occasions, il nous est arrivé de lui rendre visite aussi bien à Oka qu’à La Prairie, de bénéficier de son beau sens de l’hospitalité et de son humour pince-sans-rire. À un client de restaurant qui me croyait en compagnie de mon père, il répondit, un jour, que j’étais son garde-du-corps… Ce souvenir m’enivre d’une belle tendresse. Toujours aussi enjoué, il accueille mes filles avec des mimiques rigolotes, bien loin de l’image habituelle de l’austérité que l’on attribue aux gens d’autorité ou de prières.

Collège Jean-de-la-Menais

Jean-Jacques Campagna est un homme de foi et un éducateur. Âgé de 92 ans, il se dit aussi préoccupé par l’avenir de l’humanité et souhaiterait voir les hommes et les femmes de la Terre plus heureux et adopter une attitude plus fraternelle. Je suis déçu de voir de quelle manière on s’occupe des problèmes des pays en développement, comme à Haïti. En ce sens, il étudie attentivement les causes des guerres et des dictatures et tente de comprendre comment enrayer les inégalités sociales à l’échelle mondiale. Mon plus grand rêve, c’est que les gouvernements des pays en développement, qui ont vraiment peu de pouvoirs, puissent trouver des solutions durables pour le bonheur de leurs citoyens. Les gouvernements du monde entier devraient améliorer leur mode de communication et travailler ensemble au développement de rapports commerciaux équitables et au maintien de la paix.

Des activités et des Jeunes

Ma femme, très croyante, considère Monsieur Campagna comme une personne humble, charitable et sensible à considérer à la fois comme un frère et un père, mais surtout comme un grand ami. Elle ajoutera aussi que pour elle il s’agit d’un saint, ce à quoi Frère Campagna, dans sa grande simplicité, s’objecte avec vigueur. D’un commun accord, il nous tenait à cœur de rendre hommage à ce grand homme de son vivant, de lui dire merci et de vous offrir le portrait de cet homme de Dieu comme cadeau de Noël.

Vue du collège à La Prairie

Texte : Luc Renaud M.A. Sciences de l’éducation 21 décembre 2010